En politique, le concept de souveraineté nationale est souvent mal compris.
Il est au fondement de tous les régimes représentatifs contemporains et a été longtemps utilisé pour combattre la souveraineté populaire qui permettrait à tous les citoyens d’être souverains et prendre directement part aux décisions les plus importantes de leur pays.
Cet article vise à clarifier ces concepts et à démontrer en quoi ils diffèrent fondamentalement.
Qu’est-ce que la souveraineté nationale ?
La souveraineté nationale est un principe central du système représentatif tel qu’il est conçu dans la majorité des démocraties modernes.
Elle signifie que la source ultime de l’autorité dans un pays réside dans la nation en tant qu’entité abstraite. La nation n’est pas simplement une collection d’individus vivants aujourd’hui, mais un être collectif englobant les générations passées, présentes et futures.
En France, ce principe est explicitement mentionné dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui est au préambule de notre Constitution, selon laquelle : « Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation ».
Puisque la nation est une notion abstraite, cette souveraineté ne peut que s’exercer que par un corps qui la représente. En ce sens, la souveraineté nationale exige nécessairement une forme de représentation.
Cette représentation, toutefois, n’est pas nécessairement exercée par des représentants élus. La Nation peut aussi être représentée par un roi, mais aussi par l’ensemble des citoyens.
Ainsi, par exemple, l’article 3 de la Constitution de 1958 dit que “la souveraineté nationale appartient au peuple”.
Dans cette conception, le peuple n’est pas le souverain, puisque le souverain est la Nation, mais le peuple est le seul représentant légitime du souverain.
Ainsi, sous ce modèle, la nation, en tant qu’entité abstraite, délègue son pouvoir aux citoyens, qui prennent les décisions en son nom.
Cela dit bien par contre que l’État est souverain (et non l’Union européenne). Comme le confirme le dernier rapport annuel du Conseil d’État de 2024 sur la souveraineté (ici).
La souveraineté nationale est compatible avec l’exercice direct du pouvoir par les citoyens, du moment où ces derniers sont les représentants légitimes de la nation. C’est le cas en Suisse 🇨🇭, où ce sont les cantons, et non les citoyens, qui sont souverains. Pour autant, la volonté des cantons s’exprime uniquement par référendum. C’est ce qu’on appelle la démocratie directe.
En France, l’article 3 précise que le peuple exerce son pouvoir “par ses représentants et par la voie du référendum”.
Les représentants élus sont donc le moyen par lequel le peuple (qui est à son tour le représentant de la Nation) exerce son pouvoir. On appelle cela un régime représentatif.
Toutefois, il est précisé aussi que le peuple peut exercer son pouvoir “par la voie du référendum”. Et en cela, il y a déjà, dans notre Constitution, la possibilité pour les citoyens de prendre les décisions directement.
Pour autant, les citoyens français ne sont pas habitués à voter. La raison est que seul le président et l’assemblée élue sont habilités à déclencher un référendum. Quand les deux appartiennent au même parti, ils n’ont pas très envie de le faire.
C’est pourquoi, il suffirait de permettre aux citoyens de lancer des référendums sur un projet qui recueille suffisamment de signatures, pour avoir la main sur l’exercice de la souveraineté. Chaque citoyen pourra alors proposer et voter des lois.
A-t-on besoin d’une souveraineté populaire ?
La souveraineté populaire signifie que la souveraineté appartient directement au peuple, considéré comme un ensemble d’individus.
Chaque citoyen détient une partie de la souveraineté et a le droit d’intervenir directement dans les décisions politiques majeures, soit par le biais de référendums, soit par des initiatives législatives citoyennes.
Dans un système de souveraineté populaire, les citoyens sont les seuls détenteurs du pouvoir constituant (= décider de ce qu’il y a dans la constitution). Ils participent activement à l’élaboration des lois, aux changements constitutionnels, et au contrôle de l’action politique.
La souveraineté populaire n’exclut pas l’existence de représentants, mais exclut que les représentants se mêlent du pouvoir constituant.
Bien que ce type de souveraineté résume bien ce que nous voulons chez Solution Démocratique, notre revendication n’inclut pas un rejet de la souveraineté nationale.
Que les citoyens soient les souverains (avec la souveraineté populaire) ou qu’ils soient les principaux représentants légitimes de la nation (avec la souveraineté nationale) le résultat est le même: nous voulons que les citoyens puissent choisir directement les règles de base de notre système politique et les décisions les plus importantes de notre pays. C’est ce que nous appelons de manière simple et courte « démocratie directe », sous le modèle pratiqué en Suisse.
Cela montre que la souveraineté populaire ne permet pas de confier l’exercice de la souveraineté à des représentants, mais que la souveraineté nationale permet de confier l’exercice de la souveraineté aux citoyens.
Il est facile de comprendre pourquoi le concept de souveraineté nationale est, à tort, associé aux systèmes représentatifs. En effet :
- contrairement à la souveraineté populaire, il permet (même si ne nécessite pas) de confier l’exercice de la souveraineté à des représentants ;
- il a été historiquement revendiqué par les tenants des régimes représentatifs.
Cependant, la souveraineté nationale est aussi compatible avec la démocratie directe. Dans ce cas, la différence avec la souveraineté populaire réside dans le statut symbolique qu’à le peuple.
- Sous la souveraineté nationale, le peuple ne peut qu’avoir le statut de représentant du souverain (qu’est la nation).
- Tandis que sous la souveraineté populaire, le peuple est lui-même souverain.
Solution démocratique critique le fait que le partage de souveraineté en France entre les représentants élus et le référendum est trop déséquilibré en faveur des représentants élus, qui ont choisis seuls la quasi-totalité des changements constitutionnels qu’a connus notre pays.
Nous souhaitons mettre au cœur du système le référendum, en le rendant obligatoire pour chaque changement constitutionnel et en permettant à chaque citoyen de l’initier, par l’initiative citoyenne.
Pour cela, il n’est nul besoin de changer les fondements de notre Constitution, basée sur la souveraineté nationale.
En résumé : la souveraineté nationale peut être exercée par les citoyens
1. Certains pensent que la souveraineté nationale, qui est au fondement de la Constitution française, conduit à un système représentatif, où les citoyens ne peuvent que élire leurs représentants qui, eux, prennent les décisions.
2. Or, si la souveraineté nationale doit effectivement être représentée, ses représentants ne sont pas nécessairement élus. Les citoyens peuvent parfaitement représenter la nation par l’exercice direct du pouvoir constituant.
3. Donc, nous n’avons pas besoin de bouleverser notre constitution pour que chaque citoyen obtienne plus de pouvoir. Un changement marginal suffit : il est ici.
Vous aussi, vous pensez que changer les règles du jeu politique en instaurant la démocratie directe est la priorité absolue ?